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Document final de la

CONFERENCE INTERPARLEMENTAIRE
DE L'ASIE ET DU PACIFIQUE SUR
"LA SCIENCE ET LA TECHNOLOGIE
POUR UN DEVELOPPEMENT REGIONAL DURABLE"

Organisée par l'Union interparlementaire
Tokyo (Japon), 13-17 juin 1994


Le texte du Document final a été adopté par consensus à la séance de clôture de la Conférence le 17 juin 1994. Ce document comporte deux sections :

  • LE PROTOCOLE DE TOKYO, qui est une synthèse des conclusions de la Conférence et contient des éléments clés de ses recommandations;
  • LES CONCLUSIONS GENERALES qui présentent les recommandations de la Conférence dans tout leur contexte et traduisent la diversité des consensus qui se sont dégagés au cours du débat.

PROTOCOLE DE TOKYO
De nouvelles orientations pour les sciences et techniques

Les Parlements demandent que les sciences et techniques soient mises au service non pas de la destruction, mais d'un développement durable

La région de l'Asie et du Pacifique est fière des découvertes scientifiques et techniques faites au cours de son histoire, bien que, pendant longtemps, les sciences et techniques y aient été négligées et les conditions peu favorables à la créativité dans ces domaines. On constate depuis quelques décennies un nouvel essor des sciences et des techniques dans de nombreux pays, encore que ce ne soit pas le cas dans tous. Beaucoup se sont dotés d'une forte capacité scientifique et technique. La diversité sur ce point entre les pays de la région est telle qu'elle devrait en soi inciter à la coopération. Il est de toute évidence vital que les sciences et techniques et les efforts de coopération des pays de la région soient essentiellement axés sur la poursuite de modes durables de développement, qui concilient croissance et souci d'équité et favorisent une gestion rationnelle de l'environnement. Alliant imagination et réalisme, il convient d'encourager, au niveau tant régional que mondial, l'établissement de partenariats scientifiques et techniques qui mettent les sciences et techniques au service d'un développement régional durable.

Les Parlements ont le devoir de faire en sorte que les sciences et techniques soient l'instrument d'un développement durable, et non celui de la guerre et de la destruction de l'environnement.

Une application plus large des sciences et des techniques doit avoir pour but la satisfaction des besoins essentiels

La moitié de la population du monde vit dans la région de l'Asie et du Pacifique. C'est là aussi que se concentre la majorité de la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté. Il existe des liens étroits entre la pauvreté, la croissance démographique et les agressions de l'environnement : c'est un fait bien connu. De fait, la pauvreté est l'une des principales causes de dégradation de l'environnement. Toute stratégie réaliste ayant pour objectif un développement durable doit accorder la priorité absolue à la satisfaction des besoins essentiels de la population. Or, pour satisfaire ces besoins à longue échéance, il ne suffit pas de recourir aux mécanismes gouvernementaux de redistribution; il est impératif de réformer les institutions de telle manière que les pauvres accèdent à la propriété des avoirs et à la maîtrise du savoir. Outre ces réformes institutionnelles, les parlementaires sont tombés d'accord sur la nécessité d'axer les sciences et techniques sur l'amélioration du secteur agro-alimentaire, de mettre au point des techniques industrielles adaptées et d'assurer l'approvisionnement en énergie, les soins de santé et une gestion rationnelle de l'environnement.

  • En agriculture, la recherche devrait s'orienter vers les cultures écologiques, s'employer à améliorer les modes de culture des petits exploitants et se concentrer sur les cultures principales et secondaires propres à la région.
  • Dans l'industrie, il est nécessaire d'accroître le budget de la recherche pour mettre au point des techniques adaptées, en particulier aux industries rurales, et pour améliorer, par des innovations, le rapport coût-efficacité des techniques existantes.
  • La recherche de systèmes consommant moins d'énergie devrait aller de pair avec le développement des systèmes utilisant une énergie renouvelable, comme l'énergie solaire, la biomasse et le vent, et une meilleure application des techniques non polluantes utilisant le charbon. La conception des systèmes fonctionnant à l'énergie solaire en particulier devrait s'inscrire dans un projet global.
  • Dans le secteur des soins de santé, les sciences et techniques devraient servir à revaloriser les médecines traditionnelles par les plantes.
  • Dans le domaine de l'environnement, priorité devrait être donnée à la préservation des richesses du milieu naturel tropical propre à la région et de sa biodiversité, ce qui suppose, outre les efforts faits pour mettre en oeuvre le programme Action 21, une gestion écologiquement rationnelle de l'agriculture et des pêcheries, ainsi que le maintien de la pollution industrielle aux niveaux actuels puis leur abaissement progressif. Le programme de l'Union pour l'environnement devrait être complété par un “Réseau vert” dans la région de l'Asie et du Pacifique.
  • Les techniques nouvelles liées à l'apparition de nouveaux matériaux, à l'utilisation d'énergies renouvelables, à l'exploitation des océans, les techniques de l'électronique, en particulier celles de la biotechnologie et de l'information, doivent être appliquées dans l'optique d'un développement durable et servir à satisfaire les besoins essentiels. En matière de biotechnologie, les efforts de coopération entrepris au niveau de la région doivent se poursuivre. Pour ce qui est des techniques de l'information, outre qu'elles peuvent servir à répondre aux besoins fondamentaux, des systèmes tels qu'INTERNET peuvent être mis à profit par les parlementaires de la région et servir à une meilleure communication ainsi qu'aux échanges d'expériences.

En accordant plus d'attention à l'enseignement scolaire et extra-scolaire des sciences et des techniques, on ne peut qu'améliorer la qualité du capital humain. Rôle essentiel des femmes

Les représentants des parlements de la région voient dans le capital humain le gage le plus précieux du progrès pour leurs pays. L'enseignement des sciences et des techniques est un facteur crucial dans la formation de ce capital. Pour le développer, bien des efforts sont nécessaires : l'enseignement doit être dispensé non seulement à l'école et à l'université, mais aussi au lieu de travail, au foyer et dans la collectivité. Il faut encourager les femmes à s'engager dans tous les domaines de l'activité scientifique et technique.

  • Les disciplines scientifiques et techniques devraient tenir une place plus importante dans les programmes de l'enseignement primaire et secondaire. S'il faut améliorer la qualité de l'enseignement, l'infrastructure, par exemple les écoles destinées à former les enseignants, les laboratoires scolaires et l'équipement sont d'une importance cruciale. Il est vital d'assurer à ces postes budgétaires un financement sans surprise.
  • Les écoles techniques et polytechniques devraient être au centre du système d'enseignement. Il faut encourager les systèmes qui allient l'apprentissage à la formation technique; le gouvernement et les entreprises du secteur privé devraient travailler main dans la main pour encourager l'établissement de liens particulièrement étroits entre les écoles techniques spécialisées et les petites et moyennes entreprises.
  • Il importe de développer la recherche scientifique et technique et l'enseignement universitaire; l'enseignement et la recherche devraient être confiés à l'élite des scientifiques et des techniciens. Il conviendrait de mettre au point des systèmes appropriés de rémunération et d'améliorer les installations dont disposent les chercheurs ainsi que les accords relatifs aux échanges scientifiques.
  • Il importe d'assurer aux scientifiques et aux techniciens un rôle central dans la prise des décisions, tant au gouvernement que dans les entreprises, de créer des conditions propres à endiguer leur exode et de faire en sorte qu'ils aient des emplois à leur mesure.

Une interaction plus étroite entre l'industrie et l'enseignement supérieur peut permettre de réaliser d'importants progrès techniques et augmenter les ressources de l'enseignement supérieur

Lorsqu'il s'agit de mettre les sciences et les techniques au service d'un développement durable, les milieux des affaires et de l'industrie sont d'une importance critique. Les parlementaires ont engagé les entreprises, les universités et les écoles polytechniques à développer leurs relations pour parvenir à une véritable synergie.

  • Il est nécessaire que le secteur privé alloue davantage de ressources à la recherche-développement, aujourd'hui trop tributaire des fonds publics. Il y sera amené lorsqu'il comprendra mieux à quel point les sciences et techniques peuvent contribuer à l'amélioration de la productivité et de la rentabilité.
  • Les investissements étrangers directs donnent lieu à des transferts de technologie. Il importe de savoir sélectionner ces techniques, les absorber et les intégrer afin de renforcer la capacité scientifique et technique nationale.
  • Il est nécessaire de développer les relations entre le secteur privé et les instituts de recherche de l'enseignement supérieur en axant cette coopération sur la mise au point de nouveaux produits.

Un bon usage des sciences et des techniques dépend dans une large mesure de la politique des pouvoirs publics

Les parlementaires sont convenus que les gouvernements de la région ont le devoir d'élaborer, dans le cadre de leur politique générale de développement durable, des stratégies en faveur des sciences et des techniques ainsi que des mécanismes de mise en oeuvre et d'évaluation. Les gouvernements doivent fixer les priorités, allouer des crédits suffisants, négocier dans les institutions multilatérales, conclure des accords bilatéraux de coopération, créer les conditions dont ont besoin le secteur privé et la collectivité et se doter de leurs propres instituts de recherche scientifique et technique.

  • Les gouvernements devraient examiner les arrangements qui président actuellement au financement privé des sciences et des techniques et mettre en place les incitations nécessaires pour accroître les ressources qui leur sont affectées.
  • Il est nécessaire d'améliorer les dispositions qui sont actuellement prises pour financer la recherche du secteur public, en particulier pour accroître à long terme les ressources destinées aux sciences et aux techniques et éviter toute insécurité financière dans ce domaine, et de définir clairement les priorités.
  • Il faudrait placer les questions scientifiques et techniques au centre de la prise de décision des gouvernements, en veillant en particulier à ce que les institutions scientifiques et techniques jouent un rôle décisif dans l'appareil gouvernemental et à ce que scientifiques et techniciens aient plus de poids aux niveaux les plus élevés de la prise de décision.

Les pays de la région auraient beaucoup à gagner d'une coopération scientifique et technique

Du fait des capacités scientifiques et techniques acquises, de la diversité des niveaux de développement, en particulier dans les domaines scientifique et technique, de l'interdépendance économique croissante des pays de la région, les possibilités de coopération scientifique et technique qui s'offrent au niveau régional sont considérables.

  • Chaque pays peut tirer un enseignement des expériences faites par les autres en matière de développement scientifique et technique. Il faudrait mettre en place, en recourant aux services des institutions régionales, des dispositifs régionaux pour étudier et analyser les politiques appliquées dans la région dans les domaines scientifique et technique ainsi que leurs résultats.
  • Les pays devraient conclure entre eux des accords de coopération scientifique et technique afin d'effectuer ensemble des recherches sur des questions capitales d'intérêt commun.
  • Il faudrait favoriser l'interaction des instituts de recherche et des chercheurs de la région et développer les échanges d'informations sur les activités de recherche. Parmi les moyens auxquels on peut recourir dans ce contexte figurent les réseaux, les échanges de personnel (chargés de recherche invités, détachements) et les accords relatifs à la formation.
  • Les programmes d'aide au développement conçus par les pays de la région devraient servir à financer les dispositifs de coopération scientifique et technique mis en place au niveau régional.
  • Les organismes régionaux tels que la CESAP devraient consacrer plus d'attention aux questions touchant à la coopération scientifique et technique et pourraient envisager de prendre ce sujet comme thème spécial d'une conférence annuelle. Il importe de renforcer encore les arrangements conclus à l'intérieur de la région au sujet de la formation.

Les gouvernements de la région doivent participer de manière plus active à l'établissement de l'ordre du jour mondial en matière scientifique et technique

Si l'on veut que les sciences et les techniques soient l'instrument d'un développement durable dans la région, il faut que les conditions générales soient considérablement améliorées. Les parlementaires invitent les gouvernements des pays de la région et les pays industrialisés à agir de concert dans ce but.

  • Par leurs budgets de l'aide au développement, les pays industrialisés pourraient concentrer davantage leurs efforts sur les sciences et techniques et sur l'établissement de partenariats scientifiques et techniques dans la région.
  • Les gouvernements de la région devraient participer plus activement à l'établissement de l'ordre du jour mondial dans les domaines scientifique et technique pour que celui-ci prenne en compte les besoins spécifiques de la région en matière de recherche.

Suivi aux niveaux national et régional

Les délégations se sont engagées à travailler à la mise en oeuvre de leurs propositions dans leurs parlements et leurs gouvernements respectifs, dans les instances régionales ainsi qu'à l'Union interparlementaire.

  • Les parlements qui n'ont pas d'instance chargée de traiter des questions scientifiques et techniques devraient en envisager la création.
  • L'Union devrait envisager de constituer un groupe de travail sur les communications interparlementaires afin de mettre en place un “Réseau interparlementaire” utilisant des techniques telles qu'INTERNET.
  • Le groupe interparlementaire de l'Asie et du Pacifique assurera le suivi des recommandations relatives aux mécanismes et réseaux interparlementaires régionaux.

CONCLUSIONS GENERALES
Inventer l'avenir : les sciences et techniques pour un développement durable

Une vision régionale

1. La région de l'Asie et du Pacifique peut s'enorgueillir d'avoir été à l'origine de véritables percées scientifiques et techniques. Certains pays de la région ont été, il y a des siècles, des pionniers dans plusieurs sciences et techniques. Le monde doit à cette région des découvertes mathématiques et astronomiques, ainsi que des inventions techniques telles que celles du papier, de l'imprimerie et de la poudre à canon, qui ont infléchi le cours de l'histoire et de la civilisation. Pourtant, des siècles plus tard, la région a peu à peu perdu son dynamisme scientifique et technique et a laissé d'autres la distancer par de nouvelles inventions et par le développement d'une culture scientifique. Depuis quelques années cependant, on constate un nouvel essor des sciences et des techniques dans de nombreux pays, encore que ce ne soit pas le cas pour tous. La Conférence avait donc pour objectif premier d'encourager le développement des sciences et des techniques dans tous les pays de la région, de les amener à pousser plus loin les progrès déjà accomplis au cours des trois ou quatre dernières décennies et à accélérer le mouvement. Tokyo, symbole d'une nation qui, dans ses réalisations techniques et scientifiques, a atteint le pinacle, était bien la ville de la région la plus appropriée à une réunion de parlementaires consacrée à ces questions.

2. Les progrès scientifiques et techniques ont incontestablement apporté à l'humanité prospérité et bien-être mais l'application des sciences et des techniques a eu aussi des effets désastreux tels que la guerre et la destruction de l'environnement. Les parlements doivent veiller à ce que les sciences et techniques soient exclusivement utilisées pour le bien de l'humanité et mises au service d'un développement durable.

3. Les pays de la région ont des niveaux scientifiques et techniques très divers. Quelques-uns - les pays industrialisés, quelques pays en voie d'industrialisation depuis peu ainsi que la Chine et l'Inde - se sont dotés d'importantes ressources scientifiques et techniques, quelques autres sont en passe d'acquérir cette capacité grâce à l'efficacité de leurs politiques; d'autres encore sont beaucoup plus loin en arrière et l'expérience de ceux qui ont réussi peut leur apporter beaucoup. La situation scientifique et technique de la région est sans conteste le signe que les divisions nettes entre le Nord et le Sud s'estompent puisque les pays en développement eux-mêmes ne dépendent plus autant du Nord et des techniques occidentales que par le passé. Les pays en développement comme les pays industrialisés de la région ont une capacité scientifique et technique que peuvent mettre à profit les pays moins bien pourvus. Les moyens d'approfondir et d'intensifier les échanges dans le domaine des sciences et des techniques ne manquent pas dans la région. Il conviendrait donc d'accorder la priorité aux mesures pratiques que l'on peut prendre à cette fin.

4. La moitié de la population du monde vit dans la région de l'Asie et du Pacifique. C'est là aussi que se concentre la majorité de la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté. Si les classes aisées et les secteurs à revenu intermédiaire ont tiré avantage des sciences et des techniques, il n'en pas a été de même pour la grande majorité des pauvres. A l'heure où les nations du monde entier sont à la recherche de modes viables de développement qui assurent la croissance dans l'égalité tout en préservant les ressources vitales de l'environnement, les sciences et techniques doivent intervenir dans l'élaboration de stratégies axées sur le développement des pauvres. Il est donc crucial que les gouvernements de la région parviennent, à cette fin, à une mobilisation optimale des ressources scientifiques et techniques.

5. Gouvernements, parlements, industries, instances universitaires, organisations non gouvernementales, scientifiques et techniciens, professionnels et profanes doivent unir leurs efforts pour réinventer leur région en faisant appel à la fois à l'imagination et au sens pratique et en mettant les sciences et techniques au service d'un développement durable. La coopération scientifique et technique régionale tient une place primordiale dans la composition et la réalisation d'une vision et d'une stratégie régionales. En s'associant entre eux et avec des pays d'autres régions pour mettre au service du développement les résultats les plus récents des sciences et des techniques, les pays de la région ouvrent de larges perspectives à la coopération régionale et mondiale. De tels partenariats scientifiques et techniques sont déjà en place, bien qu'ils restent sélectifs, et il est urgent qu'ils se généralisent.

Orientation sur les besoins essentiels

6. Dans toute stratégie pratique axée sur le développement durable de la région, il faut nécessairement accorder une priorité quasi absolue à la satisfaction des besoins essentiels de la population. Ne pas répondre à ces besoins essentiels - le minimum vital en matière d'alimentation et de nutrition, de logement, de soins de santé et d'éducation - revient à priver le peuple de ses droits fondamentaux. La pauvreté dans ce sens est en fait l'une des principales causes de la dégradation de l'environnement. Les gens qui n'ont même pas le minimum pour vivre ne peuvent profiter des avantages des sciences et des techniques, puisqu'ils n'ont ni l'instruction ni les moyens économiques qui seuls mettraient ces avantages à leur portée. Les mécanismes publics de redistribution ne suffisent pas à long terme à satisfaire les besoins essentiels du peuple. La satisfaction de ces besoins devrait reposer sur la création d'emplois et l'accession aux avoirs et au savoir; or, pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de réformer les institutions économiques et sociales de la région. Les sciences et techniques ne peuvent apporter une contribution efficace que dans le contexte de telles réformes. Outre les réformes institutionnelles, la Conférence a particulièrement insisté sur l'importance d'utiliser les sciences et techniques pour améliorer le secteur agro-alimentaire, tout en mettant au point des techniques adaptées à l'industrie, en assurant l'approvisionnement en énergie, les soins de santé et une gestion écologiquement rationnelle de l'environnement.

7. Dans le domaine de l'agriculture, la productivité de la région en général est encore relativement faible par rapport à des agricultures plus avancées. Ce secteur emploie la grande majorité de la population qui travaille dans de petites exploitations et recourt à des systèmes de production traditionnels. La région a de nombreuses cultures principales et secondaires qui lui sont propres. La recherche suit encore des pistes mal adaptées aux priorités locales et nationales. La recherche agricole devrait se concentrer sur les cultures qui sont intéressantes pour le petit exploitant et l'attention se porter davantage sur les systèmes d'exploitation intégrés et écologiquement viables. Elle devrait s'orienter vers une diversification des cultures plutôt que vers des monocultures et la recherche expérimentale entreprise dans les instituts de recherche devrait être en prise directe avec l'agriculture telle qu'elle est pratiquée dans les exploitations. La région pourrait mobiliser et allouer davantage de ressources à la recherche sur des cultures telles que le riz, les céréales secondaires, les légumes, les plantes horticoles et les cultures marchandes ainsi que sur les races de bétail propres à la région.

8. Dans l'industrie, au lieu d'imiter les systèmes appliqués dans les pays industrialisés, il est nécessaire d'accorder à la recherche des crédits suffisants pour que puissent être mises au point des techniques adaptées aux facteurs de production dont sont dotés les pays de la région. Au cours des dernières décennies, la région de l'Asie et du Pacifique a vu croître les industries rurales et les petites et moyennes entreprises. Dans les pays où la pauvreté relative ou absolue est le lot d'une grande partie de la population, la recherche et le développement technique devraient permettre l'essor d'une industrie rurale spécialement axée sur la satisfaction des besoins intérieurs. Des secteurs tels que l'industrie alimentaire, le bâtiment, les matériaux de construction, l'équipement rural en matière de transport et les télécommunications doivent être prioritaires dans les plans d'aménagement technique. Il faudrait s'attacher davantage à améliorer, par des innovations, les techniques existantes, car ces perfectionnements apportés à faible coût peuvent permettre de mettre sur le marché des produits de qualité supérieure à des prix beaucoup plus bas.

9. Pour que les niveaux de vie s'élèvent, il est vital de disposer de sources d'énergie fiables. La plus grande partie de l'énergie consommée dans la région vient de la biomasse et du charbon. Dans les zones rurales, la grande majorité de la population utilise le bois de chauffage. Dans la plupart des pays, les gouvernements se sont efforcés d'accroître leur approvisionnement en énergie à partir de sources commerciales, et ils devront poursuivre avec plus de vigueur encore à l'avenir des programmes visant par exemple à pourvoir les campagnes en hydroélectricité. Cependant, la Conférence a instamment demandé que s'intensifient les efforts scientifiques et technologiques déployés pour mettre au point des systèmes qui, tout en utilisant la biomasse et le charbon, aient un rendement énergétique plus élevé, afin que les secteurs les plus pauvres de la population puissent avoir en tout temps accès à l'énergie. Il convient de consacrer davantage de ressources à l'application de techniques non polluantes fonctionnant au charbon. Les sources d'énergie renouvelables telles que le soleil et le vent revêtent une importance particulière et pourraient contribuer à atténuer le réchauffement potentiel de la planète. Il est urgent de trouver les ressources scientifiques et techniques nécessaires à une intensification de la recherche dans ces domaines, en particulier en bioénergie. Il faudrait mettre au point, à des prix compétitifs, des systèmes fonctionnant à l'énergie solaire avec tout ce que cela suppose en mont et en aval.

10. En ce qui concerne les soins de santé, la région de l'Asie et du Pacifique a fondamentalement deux systèmes : un système traditionnel, celui des populations autochtones, qui varie d'un pays à l'autre, et un secteur moderne de la santé, fondé sur une médecine plus scientifique s'entourant de techniques très poussées. La majorité de la population dans la région recourt aux soins de santé traditionnels. On assiste dans le monde entier à un regain d'intérêt pour la médecine par les plantes, sur laquelle reposent la plupart des médecines traditionnelles qui ont cours en Asie et dans le Pacifique. Parallèlement à la modernisation des techniques de santé, déjà engagée, il est nécessaire, pour des raisons d'économie et de rentabilité, que la recherche scientifique s'intéresse de plus près aux médecines traditionnelles et s'attache à les valoriser.

11. Pour ce qui est de l'environnement, une gestion efficace est d'une importance cruciale pour un développement durable et la satisfaction des besoins essentiels. Il est primordial que la région de l'Asie et du Pacifique préserve et conserve les richesses et l'équilibre écologique de son milieu naturel tropical, qui repose sur les forêts ombrophiles. Il est nécessaire de préserver la biodiversité liée à ces forêts comme celle que l'on trouve dans d'autres écosystèmes. Il faut mettre un terme à la dégradation des sols et réduire progressivement d'autres types de dégradation de l'environnement tels que la pollution industrielle actuellement en augmentation. Il conviendrait d'appliquer plus largement les pratiques qui favorisent une gestion écologiquement rationnelle de l'agriculture et des pêcheries. Dans la région, l'expérience des uns peut servir à beaucoup d'autres, et le programme mondial de l'environnement, déjà mis en place par l'Union, devrait être complété par un “réseau vert” dans la région de l'Asie et du Pacifique. On pourrait envisager dans ce contexte d'étendre les politiques et les mesures pratiques ayant pour but un environnement plus sain. Seule l'application des sciences et des techniques peut permettre aux pays en développement de gérer leur environnement de manière rationnelle. La Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (Rio de Janeiro, juin 1992) a indiqué, dans son programme Action 21, la voie à suivre pour améliorer l'environnement à l'aide des sciences et des techniques. La Conférence de l'Asie et du Pacifique a donc réitéré l'appel lancé par la Conférence interparlementaire sur l'environnement et le développement (Brasilia, novembre 1992) pour que les accords conclus à Rio soient effectivement mis en oeuvre.

Exploitation des techniques nouvelles

12. La Conférence a reconnu que les découvertes et inventions scientifiques et techniques contribuent à un changement profond et de plus en plus rapide des structures économiques et sociales. Dans la plupart des secteurs de l'activité humaine, on assiste à la mise au point de techniques nouvelles qui sont ensuite appliquées à une très large échelle et qui, utilisées de manière rationnelle et judicieuse, favorisent grandement un développement durable. Pour ce qui est des nouveaux matériaux, de l'exploitation de l'océan, de l'électronique et des énergies renouvelables, pour n'en citer que quelques domaines, les progrès scientifiques et techniques offrent à l'humanité la possibilité d'orienter les applications scientifiques et techniques dans de nouvelles directions. De toutes les sciences et techniques, la Conférence en a retenu au moins deux, la biotechnologie et les techniques de l'information, jugeant qu'il fallait leur accorder une importance prioritaire dans le contexte du développement durable et de la satisfaction des besoins essentiels.

13. La Conférence a noté que la biotechnologie pouvait servir à améliorer l'agriculture, en particulier par la création de nouvelles variétés de plantes, la lutte phytosanitaire et la zootechnie. Elle a des applications importantes dans le domaine des soins de santé élémentaires et la mise au point de produits pharmaceutiques, notamment d'agents diagnostiques et prophylactiques peu coûteux, et peut améliorer l'accès à l'énergie produite à partir de la biomasse et aux applications industrielles. Les pays industrialisés investissent beaucoup dans la recherche-développement en biotechnologie. La Conférence a instamment engagé les gouvernements à accorder la plus grande importance au renforcement de la capacité régionale de recherche-développement et a demandé que soit créée une infrastructure institutionnelle pour exploiter les résultats obtenus en biotechnologie. La coopération régionale peut permettre d'entreprendre à moindres frais des activités de recherche-développement et se révéler ainsi très utile.

14. La Conférence a reconnu que les techniques de l'information sont en train de transformer rapidement les habitudes et comportements des milieux des affaires et de l'industrie, du gouvernement, des ménages et des gens ordinaires. D'énormes quantités de données et d'informations sont produites, analysées, diffusées et utilisées à des fins diverses. Les techniques de l'information peuvent se révéler un outil fantastique en favorisant un usage rationnel des ressources naturelles, du savoir-faire, ainsi que des biens et des services créés par la société et en assurant ainsi un développement durable et la satisfaction des besoins essentiels. Les techniques de l'information ne doivent pas seulement servir aux plus qualifiés et aux experts mais peuvent et doivent être utiles à tout un chacun. Les parlements de la région, en particulier, devraient avoir recours aux services qu'INTERNET met aujourd'hui à leur disposition.

L'être humain, un bon investissement

15. La Conférence a reconnu que le capital humain était, pour un pays, le gage le plus précieux du progrès. L'enseignement des sciences et des techniques tient une place critique dans la formation de ce capital. Il ne saurait être dispensé uniquement par le système d'éducation classique; aussi faut-il parvenir à des accords plus vastes pour que cet enseignement puisse être donné non seulement à l'école et à l'université, mais aussi au lieu de travail, au foyer et dans les communes. On ne peut assister à la naissance d'une culture scientifique et technique telle qu'on la trouve dans nombre de pays industrialisés que si le grand public se livre à des degrés divers à des activités scientifiques et techniques. Il n'appartient pas seulement aux gouvernements de favoriser une telle évolution; ce devrait être aussi le but des institutions du secteur privé, des organisations non gouvernementales et des grands instituts scientifiques et techniques dont la plupart des pays sont aujourd'hui dotés. La mise en oeuvre effective des programmes de développement durable, quels qu'ils soient, dépendra essentiellement de l'engagement et de la participation sincère de tous les groupes sociaux. La communauté internationale, jugeant bénéfique l'intégration des femmes, a plaidé sans équivoque pour qu'elles participent sur un pied d'égalité à toutes les activités de développement. Il importe assurément d'insister sur cette participation dans tous les secteurs de l'activité scientifique et technique. La Conférence souscrit sans réserve à cet appel, estimant que les femmes ont un rôle actif à jouer en se servant des sciences et des techniques pour mettre les pays de leur région sur la voie d'un développement durable.

16. Les sciences et techniques, de même qu'une gestion durable des ressources, devraient toujours tenir une place importante dans les programmes de l'enseignement primaire et secondaire. S'il était d'usage de donner la priorité aux arts et aux humanités au détriment des sciences, cet usage est en train de changer dans la plupart des pays où le système éducatif attache maintenant la même importance à ces matières, qu'il ne faut certes pas négliger, qu'aux disciplines scientifiques et techniques. Il faudrait encourager les filles à suivre les filières scientifiques et techniques. Les gouvernements doivent s'attacher à améliorer constamment la qualité de l'enseignement et les niveaux des sciences et des techniques. Les écoles ayant pour vocation de former les professeurs des disciplines scientifiques et techniques doivent occuper une place prioritaire dans la politique de l'éducation. Il faut débloquer les ressources nécessaires pour équiper les écoles en laboratoires et en matériels scolaires suffisants, en ordinateurs par exemple. L'enseignement secondaire a eu de grandes difficultés à obtenir des fonds publics pour l'achat de biens d'investissements et pour l'entretien des laboratoires et de l'équipement scientifique. Les gouvernements doivent assurer à ces postes budgétaires un financement sans surprise.

17. La Conférence a admis que les écoles techniques et polytechniques, et d'autres établissements comparables, tant généraux que spécialisés, ont énormément contribué à l'amélioration de l'enseignement scientifique et technique dans nombre de pays industrialisés. Les pays dotés depuis longtemps d'établissements spécialisés dans l'enseignement technique sont à l'avant-garde du développement scientifique et technique. Une meilleure connaissance de leur expérience, en particulier des dispositions prises par exemple pour combiner apprentissage et formation technique dans des secteurs spécialisés, serait d'un grand profit pour les pays de la région. Beaucoup d'entre eux doivent redoubler d'efforts pour mettre en place des systèmes de formation technique et les améliorer. S'il incombe aux gouvernements de coordonner ces efforts, les entreprises du secteur privé ont un rôle vital à jouer dans la mise en place des systèmes de formation. Les écoles techniques spécialisées devraient s'efforcer de nouer des liens étroits avec de petites et moyennes entreprises de leur région afin qu'il y ait une interaction technique constante entre eux, ce qui ne devrait pas seulement donner à la recherche des objectifs plus pratiques mais ouvrir aussi aux entreprises de nouveaux créneaux et de nouvelles sources de profit.

18. L'enseignement des sciences et des techniques dans les universités est un facteur essentiel de progrès national. Alors que de nombreux pays de la région ont des universités dotées d'une forte capacité scientifique et technique, beaucoup d'autres restent à la traîne. Il faut encourager les universités à recruter les meilleurs scientifiques et techniciens pour l'enseignement et la recherche. Pour ce faire, il convient d'établir des systèmes de rémunération appropriés, de doter la recherche d'installations adéquates et de faciliter les échanges d'expériences. Les universités elles-mêmes doivent s'attacher davantage à nouer des relations avec les milieux commerciaux et industriels afin que les résultats de la recherche soient plus directement applicables par les entreprises. Les universités de la région pourraient bénéficier de l'expérience acquise à cet égard dans de nombreux pays industrialisés où les universités, ayant des relations très profitables avec les milieux commerciaux et industriels, ont aussi davantage de ressources à leur disposition.

19. La Conférence a demandé instamment que gouvernement et secteur privé attachent la plus haute importance à ce que scientifiques et techniciens soient assurés de jouer un rôle central dans la collectivité et au lieu de travail. Les compétences des scientifiques et des techniciens devraient être mises à profit : aussi, devraient-ils être en bonne place dans le gouvernement et le secteur privé, siéger en particulier aux conseils d'administration des grandes entreprises. Depuis quelques décennies, les pays de la région souffrent cruellement de l'exode des cerveaux ainsi que d'une piètre utilisation des compétences. Il importe d'enrayer ces problèmes, non pas par des contrôles, mais par la création d'un environnement plus accueillant pour les savants et les techniciens. Il importe tout particulièrement d'encourager et d'inciter les femmes à s'engager davantage dans les nombreux secteurs scientifiques et techniques. Il faudrait les encourager à prendre la place qui leur revient dans les universités et les conseils d'administration des grandes entreprises privées.

Le monde des affaires et de l'industrie

20. La Conférence a vivement insisté sur le rôle que peuvent jouer les milieux des affaires et de l'industrie en renforçant la contribution des sciences et techniques au développement durable. Comme on a de plus en plus tendance à s'en remettre aux forces du marché et aux institutions du secteur privé pour ce qui est du développement économique, il est indispensable que les milieux industriels et commerciaux mettent les ressources scientifiques et techniques dont ils disposent au service d'un développement durable. Si la politique des pouvoirs publics est importante pour que le secteur privé puisse tirer le meilleur parti de cette capacité scientifique et technique, il a cependant une marge de manoeuvre suffisamment large pour pouvoir prendre des initiatives.

21. D'après les indications dont on dispose aujourd'hui, il n'y a guère de doute que, dans la plupart des pays de la région, le secteur privé est loin derrière celui des pays industrialisés, pour ce qui est des ressources allouées à la recherche-développement. Dans les pays industrialisés en général, une forte proportion des ressources consacrées à la recherche-développement vient du secteur privé. Dans la plupart des pays de la région Asie-Pacifique, la part de la recherche-développement financée par le secteur privé est relativement modeste, beaucoup plus qu'elle ne devrait l'être. La plupart des firmes industrielles, et en particulier les petites et moyennes entreprises, n'allouent à la recherche-développement qu'une infime partie de leur chiffre d'affaires. Elles comptent beaucoup trop sur la recherche financée par le gouvernement, comme si la fonction de la recherche-développement lui revenait exclusivement. Il est important que les milieux commerciaux et industriels prennent peu à peu conscience des débouchés que la recherche-développement peut leur ouvrir et de la contribution qu'elle peut apporter à la réalisation des grands objectifs sociaux. La Conférence a instamment engagé gouvernement et secteur privé à redoubler ensemble d'efforts pour accroître les crédits accordés à une recherche-développement directement applicable.

22. Pour bien des pays de la région, le développement dépend dans une large mesure des investissements étrangers directs et du transfert de technologie de l'étranger. Les investissements étrangers directs sont étroitement liés aux mouvements des techniques et nombre de pays voient dans ces investissements la clé du progrès technique. La région de l'Asie et du Pacifique est l'une des principales destinations des capitaux étrangers mais il y a aussi une circulation intense des investissements et des techniques à l'intérieur de la région. Si les transferts de techniques sont régis principalement par les forces du marché qui déterminent l'attrait des investissements et les débouchés commerciaux, on s'aperçoit de plus en plus que bon nombre de pays de la région ont besoin, pour connaître un développement durable, d'améliorer leur capacité d'absorption et d'intégration des techniques importées. Grâce à elle, les pays en développement de la région devraient pouvoir se doter d'une capacité technique propre. La Conférence a invité les établissements industriels et commerciaux du secteur privé, et les institutions représentatives telles que les Chambres du commerce et de l'industrie, à se concentrer davantage sur la sélection, l'appropriation et l'absorption des techniques importées afin de rehausser le niveau technique de leur pays.

23. La Conférence a relevé un phénomène constant dans la plupart des pays de la région, à savoir la faiblesse et la fragilité des liens qui existent entre le secteur privé, d'une part, et l'université et d'autres établissements de recherche et d'enseignement scientifique supérieur, de l'autre. Les relations entre l'industrie et les établissements de recherche et d'enseignement supérieur ne reposent sur aucune tradition solide. Elles ont été négligées, ce qui a compromis les chances des deux côtés, et il y aurait beaucoup à faire pour les améliorer. Les universités peuvent être plus attentives aux besoins des milieux commerciaux et industriels, en particulier en ce qui concerne les perfectionnements techniques à apporter aux produits et aux services. Elles peuvent envisager de mettre par contrat leur capacité scientifique et technique à la disposition de l'industrie. De leur côté, les entreprises industrielles et commerciales peuvent attirer l'attention des universités sur les problèmes scientifiques et techniques qu'elles rencontrent et qui appellent des solutions pratiques. La Conférence a instamment engagé le secteur privé, les universités et les écoles polytechniques à travailler en symbiose et à exploiter leurs connaissances des sciences et des techniques de manière à créer une véritable synergie.

Le rôle du gouvernement

24. La Conférence a souligné le rôle central que jouent les gouvernements en élaborant une politique générale des sciences et des techniques dans l'optique d'un développement durable et en faisant en sorte qu'elle soit systématiquement appliquée. Si beaucoup de gouvernements de la région ont mis en place une politique cohérente en matière scientifique et technique, beaucoup d'autres doivent encore y apporter des améliorations considérables. Le gouvernement a notamment pour fonctions d'établir des priorités, d'assurer aux sciences et techniques et à la recherche-développement un financement suffisant, de négocier dans les institutions multilatérales, d'élaborer des accords bilatéraux de coopération scientifique et technique, d'encourager le secteur privé et de mettre en place ses propres instituts de recherche scientifique et technique.

25. Les gouvernements déterminent le montant des ressources allouées aux sciences et techniques, ce qui n'est pas une décision négligeable. Dans ce contexte, il leur faut encourager l'industrie à investir davantage dans les sciences et techniques. Ils devraient prendre des dispositions pour que soient réexaminés les niveaux actuels de financement des sciences et techniques par l'industrie et les accords conclus en la matière, et étudier les mesures à adopter pour que ce financement augmente, en particulier dans des secteurs critiques pour le développement national. Dans beaucoup de pays, la recherche scientifique est financée au moyen de prélèvements sur un groupe de produits. Cependant, si ce système donne satisfaction à certains égards, il peut aussi amener à abandonner des secteurs qui pourraient être importants mais qui ne peuvent pas, dès le début, produire assez de fonds pour s'autofinancer.

26. Les gouvernements de la région dépensant pour la recherche scientifique entre 0,2 et 1 pour cent de leur PNB, il est vital de tirer le parti maximum de ces ressources; aussi les gouvernements doivent-ils veiller à la rentabilité des efforts de recherche, axer celle-ci sur des secteurs hautement prioritaires et rester en relation avec l'industrie privée pour que les entreprises puissent faire bon usage des résultats de la recherche financée par les fonds publics. Les crédits accordés par le secteur public aux sciences et aux techniques sont insuffisants dans la plupart des pays et les gouvernements semblent n'attacher à ce poste budgétaire qu'une importance très secondaire. S'il est vrai qu'il faut considérer les résultats de la recherche à moyen et à long terme, les gouvernements ne doivent jamais oublier qu'il s'agit là d'un facteur vital pour le progrès économique et social de leur pays et qu'il importe donc de maintenir le niveau de financement actuel et de l'augmenter progressivement.

27. La Conférence a estimé que les questions d'ordre scientifique et technique devaient tenir une place centrale dans l'ordre du jour gouvernemental, que les institutions et organismes compétents devraient être plus largement consultés et participer à la prise des décisions et à la définition de la politique gouvernementale. Il est aussi indispensable que les gouvernements mettent en place l'appareil requis pour évaluer et appliquer des approches coordonnées et interdisciplinaires, puisque les sciences et techniques ne peuvent être efficaces en l'absence d'une politique globale du développement durable. Les gouvernements doivent permettre aux scientifiques et aux techniciens de jouer un rôle plus actif dans la prise de décisions et, pour ce faire, élaborer des programmes appropriés de recrutement, de promotion et de rémunération; ils doivent aussi donner aux scientifiques et aux techniciens la possibilité d'acquérir l'expérience dont ils ont besoin en les laissant participer à des programmes d'échanges et en leur accordant des congés sabbatiques. Les gouvernements devraient aussi envisager de publier, au moins tous les deux ans, un rapport sur le développement des sciences et techniques dans leur pays, afin de contrôler régulièrement les progrès accomplis dans ces domaines.

Partenariat régional

28. La Conférence a admis que, vu la situation économique et sociale de la région, il fallait de toute évidence intensifier les efforts déployés pour trouver des formes novatrices de coopération entre les pays de la région. Les importantes ressources scientifiques et techniques dont disposent de nombreux pays, la diversité des niveaux de développement et, partant, celle des besoins, enfin l'interdépendance économique croissante sont autant de facteurs qui, combinés, rendent possible une plus large coopération scientifique et technique entre les pays de la région. Si l'on constate déjà dans la région une augmentation des transferts de technologie liés aux investissements, il faut qu'ils se développent encore. Cependant, la coopération régionale peut passer par bien d'autres mécanismes qu'il importe d'exploiter à fond.

29. Chacun des pays de la région peut tirer un enseignement utile des expériences faites par les autres en matière de développement scientifique et technique. Nombre de pays, en particulier de l'Asie du Nord et de l'Est et d'Australasie, ont acquis une forte capacité technique et scientifique en mettant au point une gamme de politiques propres à favoriser une interaction entre le gouvernement et le secteur privé, la sélection et l'adaptation des techniques étrangères et la création de l'infrastructure nécessaire à la recherche-développement. Les résultats obtenus par ces pays grâce à leur politique devraient être examinés de plus près par d'autres pays de l'Asie et du Pacifique afin que la région tout entière améliore sa prestation. Il faudrait mettre en place, en recourant aux services des institutions régionales, des dispositifs régionaux pour étudier et analyser les politiques appliquées dans la région dans les domaines scientifique et technique afin que le processus d'apprentissage s'intensifie et que puisse être élaborée une politique plus adaptée aux besoins de la région.

30. La Conférence a instamment engagé les gouvernements à examiner d'urgence les efforts de recherche déployés en coopération avec d'autres pays de la région sur des questions scientifiques et techniques capitales d'intérêt commun, et à favoriser un développement durable. Les pays industrialisés, qui ont conclu des accords internationaux de coopération scientifique et technique pour traiter de questions d'intérêt commun qui nécessitent une recherche coûteuse et de haute qualité, ont accumulé une vaste expérience dont d'autres peuvent aujourd'hui bénéficier. Les pays de la région pourraient initialement concentrer leur effort de recherche sur quelques secteurs spécifiques tels que la gestion écologiquement rationnelle des ressources naturelles locales et les produits agricoles propres à la région.

31. Il y a beaucoup à faire pour favoriser une interaction plus grande entre les instituts de recherche et entre les chercheurs. Il est primordial de faire en sorte qu'instituts et chercheurs soient mieux informés des recherches menées dans la région et de créer un lieu qui rende possible ces échanges d'information. Des centrales spécialisées dans ce genre d'informations sont donc indispensables. Il devrait être possible, sur un plan pratique, d'encourager les instituts à se constituer en réseau, ce qui leur permettrait d'être au courant de l'activité de chacun et de se diviser le travail en matière de recherche, et de mettre au point des systèmes d'échanges de personnel (chargés de recherche invités, personnel détaché). On pourrait aussi favoriser dans la région des arrangements en matière de formation par le biais des réseaux de chercheurs.

32. Nombre de pays de la région ont les moyens d'offrir à d'autres pays moins nantis sur le plan scientifique et technique une aide modeste au développement. Leur budget d'aide au développement devrait leur permettre d'offrir des facilités qui aillent dans le sens des arrangements scientifiques et des accords de coopération mentionnés aux paragraphes ci-dessus. Les arrangements de coopération technique conclus au niveau régional pourraient porter en priorité sur les échanges de compétences et la formation scientifique et technique.

33. Les organismes régionaux peuvent jouer un rôle important en favorisant une plus large coopération scientifique et technique dans la région et en entreprenant les tâches esquissées par la Conférence. La Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie et le Pacifique (CESAP) pourrait s'intéresser de plus près aux questions de la coopération scientifique et technique et envisager de prendre la question des sciences et des techniques, instrument d'un développement durable, comme thème spécial de l'une de ses sessions annuelles. D'autres instances inter-gouvernementales régionales, ainsi que l'Université des Nations Unies, sise à Tokyo, pourraient aussi par des activités connexes stimuler la coopération régionale. Celle-ci doit s'appuyer sur tout un arsenal de politiques régionales dont l'élaboration relève d'une instance régionale comme la CESAP. Il conviendrait de porter une attention particulière à la mise en place d'arrangements et de mécanismes de formation intrarégionaux permettant de dispenser à moindres frais une formation scientifique et technique de qualité. Dans ce but, il conviendrait de recourir aux institutions qui existent déjà dans la région et d'envisager d'en créer de nouvelles.

La perspective mondiale

34. Constatant que les budgets de l'aide publique au développement (APD) de certains pays présentent une regrettable tendance à la baisse, la Conférence a engagé les pays industrialisés et les organisations multilatérales à redoubler d'efforts pour doter la région de l'Asie et du Pacifique d'une capacité scientifique et technique telle que les pays de la région puissent progresser sur le plan économique en appliquant des modes de développement respectueux de l'avenir. Les pays industrialisés ont beaucoup contribué au développement des sciences et des techniques dans la région par des investissements directs et des transferts de technologie, l'aide au développement, la coopération technique et par toute une gamme de mécanismes ayant pour objet des échanges de compétences et d'expériences. L'aide au développement, en particulier aux pays en développement les moins avancés, devrait s'orienter davantage sur des partenariats scientifiques et techniques et la constitution de capacités scientifiques et techniques.

35. La Conférence a instamment engagé les gouvernements de la région à participer plus activement à l'établissement de l'ordre du jour mondial en matière scientifique et technique et à imposer davantage leurs idées. De plus en plus, des questions touchant aux sciences et aux techniques font l'objet de négociations multilatérales, que ce soit dans le cadre de grandes conférences comme la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement ou dans des instances moins connues du grand public, rattachées au système des Nations Unies ou à d'autres organisations intergouvernementales. Les gouvernements de la région devraient s'attacher à harmoniser leurs positions en ayant en vue les intérêts de leur pays et de leur région et à faire inscrire à l'ordre du jour mondial les thèmes d'intérêt commun. Par exemple, ils devraient se fixer pour but d'encourager davantage la recherche sur les systèmes d'agriculture adaptés à la région et, dans le domaine de la santé, chercher à obtenir l'allocation de crédits plus importants à la recherche sur les maladies tropicales.

Suivi et initiatives des parlements et de l'Union interparlementaire

36. La Conférence a estimé que les participants à titre individuel et les Groupes interparlementaires nationaux de l'Asie et du Pacifique devaient s'employer résolument à mettre en oeuvre les recommandations ci-dessus. Comme elles portent sur un très large éventail de sujets, leur suivi ne relève pas seulement de la compétence des parlements et des gouvernements nationaux, mais aussi des organismes régionaux et des organisations multilatérales.

37. Parlements et parlementaires auraient beaucoup à gagner en exploitant à fond les techniques modernes de communication et d'information telles qu'INTERNET. La Conférence a donc recommandé que le Conseil interparlementaire envisage de constituer un groupe de travail sur la communication interparlementaire en vue de la création d'un réseau interparlementaire.

38. S'agissant des recommandations faites à propos de la création de mécanismes ou de réseaux interparlementaires régionaux, la Conférence a relevé qu'il était nécessaire de poursuivre et d'approfondir encore l'étude de la nature, de la portée et des conséquences de ces recommandations. Aussi a-t-elle recommandé à leurs auteurs et aux parties intéressées de les soumettre à la prochaine réunion du groupement de l'Asie et du Pacifique afin que celui-ci réfléchisse au moyen de les intégrer au programme général d'activités des parlements concernés.

39. La Conférence a recommandé aux parlements qui n'ont pas encore d'organe, commission ou autre, chargé d'examiner les questions relatives aux sciences et techniques, d'envisager d'en créer un conformément à leur règlement intérieur afin de mieux traiter de ces questions.

40. Ayant cet objectif en vue et pensant à l'immédiat, la Conférence a engagé

a) les Groupes nationaux de l'Asie et du Pacifique à :

  • veiller à ce que les conclusions de la Conférence reçoivent de leurs gouvernements et parlements respectifs, en particulier des commissions parlementaires chargées des questions relatives aux sciences et techniques et de la coopération au développement, l'attention qu'elles méritent;
  • donner à ces conclusions la plus large publicité possible dans leurs pays en les diffusant auprès des médias, des milieux scientifiques, des groupes d'intérêt spécialisés et des organisations non gouvernementales concernées;

b) le Secrétaire général de l'Union interparlementaire à communiquer les conclusions de la Conférence aux institutions internationales, mondiales et régionales, intéressées en les priant d'accorder une attention particulière aux recommandations.


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