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SEMINAIRE REGIONAL SUR
"LE PARLEMENT ET LE PROCESSUS BUDGETAIRE, NOTAMMENT DANS UNE PERSPECTIVE D'EQUITE ENTRE HOMMES ET FEMMES"

Bamako (Mali), 1er au 3 novembre 2001

Le séminaire s'est tenu à l'intention des Parlements d'Afrique francophone, arabophone et lusophone. Organisé conjointement par l'Assemblée nationale du Mali et l'Union interparlementaire, avec le soutien du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et la Banque mondiale, le séminaire a rassemblé des parlementaires et fonctionnaires parlementaires des 13 pays suivants: Algérie, Angola, Burkina Faso, Cameroun, Cap-Vert, Mali, Maroc, Niger, République centraficaine, Rwanda, Sénégal, Tchad et Togo.

Durant les trois jours qu'a duré le séminaire, les délégués ont débattu des rôles respectifs du gouvernement eet du parlement dans le processus budgétaire; du contrôle parlementaire pour assurer la transparence et responsabilité dans le processus budgétaire, du rôle de la Cour des comptes en la matière et enfin des moyens et mécanismes pour établir un budget qui tienne compte de l'équité entre hommes et femmes.

Le Rapport général suivant, qui reflète les travaux de ce séminaire, a été adopté par les participants.


RAPPORT GENERALE
présenté par M. Lahaou Touré (Mali), Rapporteur général

Introduction

Le budget de l'Etat est au cœur de l'exercice des missions publiques. Il conjugue le souhaitable, c'est à dire les ambitions d'une politique efficace, et le soutenable, à savoir les moyens d'action financier permettant aux Pouvoirs publics d'inscrire leur politique dans un équilibre économique et financier. Il est le principal instrument de la modernisation de la gestion publique. Il permet d'identifier les politiques favorisant l'égalité entre hommes et femmes. Il est enfin un outil indispensable pour mener la lutte contre la pauvreté.

Il faut cependant constater qu'un certain nombre de postes budgétaires (dépenses en personnel, aide publique, etc.) sont difficilement compressibles et entraînent des dépenses obligatoires. La marge de manoeuvre pour accentuer des politiques ou en promouvoir de nouvelles est donc souvent restreinte, mais pour faible qu'elle soit, cette marge justifierait déjà à elle seule un débat parlementaire intense.

La procédure budgétaire est définie par le droit public. Elle impose aux Pouvoirs publics des règles destinées à garantir un emploi optimum et transparent des deniers publics.

Dans le cadre la procédure budgétaire, le Gouvernement et le Parlement exercent la plénitude de leurs pouvoirs, dans le respect de leurs compétences institutionnelles et du principe de la séparation des pouvoirs..

Dans une perspective de bonne gouvernance incluant la lutte contre la pauvreté et la dimension genre, une réforme de la gestion publique permettant de passer d'une logique de moyens à une logique de résultats devrait être l'un des objectifs de la réforme de l'Etat. Le renforcement du rôle et des pouvoirs du Parlement, notamment l'amélioration de son information et de ses pouvoirs de contrôle, sont une condition d'une démocratie vivante et responsable.

Par ailleurs, la conduite des politiques budgétaires nationales peut s'améliorer par la comparaison et la coordination au niveau régional. A cet égard, le recours à un cadre commun de comptabilité, l'échange de bonnes pratiques, la surveillance multilatérale et la définition de bench marks (normes idéales) peuvent favoriser la bonne gouvernance.

Définitions

Les caractéristiques du budget national sont :

  • L'unicité : L’élaboration d'un budget unique présente des avantages en terme de cohérence. Il permet une vision d'ensemble de la politique de l'Etat.

  • La cohérence : Il est nécessaire d'assurer une cohérence entre les différents secteurs d'activités couverts par le budget national.

  • La rigueur : L'élaboration d'un budget doit être fondée sur des estimations rigoureuses des recettes et des besoins.

  • La transparence :
    i) Il est important de s'assurer que tous les éléments et secteurs d'activités soient bien pris en compte dans le budget national, y compris les interventions des partenaires extérieurs;
    ii) Les dons et legs reçus en cours d’année budgétaire doivent être intégrés dans le budget national en application du principe d'unicité du budget.

  • La prudence et le réalisme : Dans la mesure où, en matière budgétaire, la demande est toujours supérieure aux disponibilités, les priorités et choix budgétaires doivent être déterminés de façon réaliste.

  • L’annualité : Si les dépenses d'investissement ont un effet pluriannuel alors que les dépenses courantes s'exécutent toutes au cours de l'année budgétaire, il est important que les crédits dissociés figurent dans le budget annuel, même si celui-ci n'indique en crédits d'ordonnancement que les dépenses à exécuter dans l'année.

  • La spécialisation budgétaire :
    i) Pour assurer la cohérence, la transparence et la rigueur budgétaire, il est important d'inclure sous un titre précis chaque dépense envisagée;
    ii) Le Budget-programme est une structure de programmes regroupant les activités du ministère à évaluer sur plusieurs années, l'ensemble des ressources affectées à ces activités et leur emploi par nature économique. Il définit et chiffre les indicateurs physiques les plus significatifs, les moyens mis en œuvre et les résultats. Il organise les choix budgétaires en fonction d'objectifs de politiques publiques. C'est la méthode d'allocation des ressources à travers l'analyse des coûts et des résultats attendus des interventions publiques. La classification budgétaire n'est plus basée sur la structure des services mais sur les programmes et donc sur les finalités des politiques publiques.
Définition concernant les recettes
  • La légalité : seule la loi peut autoriser l'impôt;

  • L'égalité : pas de privilège en matière d'impôt;

  • L'unicité de caisse : toutes les recettes fiscales et non fiscales sont comptablisées dans le budget.
Définition concernant les dépenses
  • L'universalité : Le budget doit contenir toutes les recettes et toutes les dépenses;

  • L'égalité : Seule la loi peut autoriser ou ratifier une dépense à charge du Trésor.
Rôles respectifs du Gouvernement et du Parlement

Le Gouvernement élabore le budget et y inscrit ses priorités.

Dans le cadre de son programme économique, financier, social et culturel, il définit une série d'actions en s'inscrivant dans un environnement et des contraintes internationales et en adaptant ses projets aux performances de l'économie nationale. Il veille à ce que le budget contribue par des mesures cycliques (soit des mesures qui s'adaptent aux circonstances économiques) à soutenir le développement économique du pays.

Il respecte les compétences institutionnelles du Parlement en lui soumettant un document précis et complet qui met en évidence les orientations essentielles du budget, les mesures nouvelles par rapport au budget précédent et l'inscription du budget dans le cadre macroéconomique.

A cet effet, il est souhaitable que les documents budgétaires transmis au Parlement comportent une description précise du contexte économique et notamment des prévisions de croissance du PIB, des prévisions d'inflation et de la description des mesures cycliques proposées ainsi qu'un rapport détaillé sur l'exécution du budget de l'année en cours.

Il serait également intéressant que l'exposé général accompagnant le budget indique, tant au niveau des recettes qu'au niveau des dépenses, en quoi le budget peut aider à une lutte efficace contre la pauvreté et comporte des indications quant aux progrès réalisés et aux politiques nouvelles en matière d'équité entre hommes et femmes.

Le budget doit être déposé suffisamment tôt pour permettre au Parlement de disposer du temps nécessaire pour participer efficacement à son examen et proposer d'éventuels amendements avant le vote d'adoption de la loi du budget.

Il est également proposé que chaque ministre accompagne la partie du budget concernant son département d'une note de politique générale décrivant, pour les douze mois à venir, les principaux axes de la politique du ministre et les moyens qui y sont consacrés.

Pourquoi le Parlement doit s'investir dans le budget ?

Le budget est l'occasion pour le Parlement d'assumer complètement la mission qui est la sienne dans une démocratie :

  • Il exerce sa capacité de proposition en proposant d'éventuels amendements et en mettant l'accent sur les priorités qu'il entend voir traduites dans les actes du Gouvernement;
  • L'opposition utilise le débat budgétaire pour développer ses propositions alternatives;
  • La majorité, par le vote du budget, manifeste sa confiance dans l'action du Gouvernement tout en soulignant les points qui justifient cette confiance, et la convergence entre la politique menée et le programme sur lequel la majorité a été élue;
  • Le Parlement exerce sa mission de contrôle des actes du Gouvernement;
  • Tout au long de l'exécution du budget, il exerce le suivi et, s'appuyant sur les instruments de contrôle dont il peut disposer, veille à la régularité de l'utilisation des finances publiques;
  • A l'occasion de la Loi de Règlement, il donne "quitus" au Gouvernement, achevant ainsi le cycle budgétaire.
Elaboration du budget

Il est souhaitable que les parlementaires, relayant les préoccupations du terrain, puissent formuler, préalablement au dépôt du budget, un certain nombre de suggestions aux divers ministères. Il le font après avoir recueilli les vœux de leurs électeurs, procédé à des auditions et consultations de la société civile, notamment les ONGs et les associations, et le cas échéant en relayant les résultats des travaux des corps électifs dont ils font partie au niveau local ou provincial.

Lecture et adoption du budget

L'examen des dispositions du budget doit se dérouler principalement au sein de la Commission des finances. Celle-ci doit avoir la possibilité de solliciter l'avis de commissions spécialisées appelées à se prononcer, dans leur domaine de compétence, sur les diverses parties du budget après audition des ministres responsables. A cet égard, mérite d'être soulignée l'expérience du Burkina Faso qui a créé au sein de la Commission des finances, des sous-commissions chargées d'étudier un certain nombre de budgets après avoir rencontré et auditionné les ministères responsables.

La Commission des finances peut ainsi assurer la synthèse des débats et permettre un examen et l'adoption en séance plénière. Elle établit un rapport général donnant l'analyse propre au Parlement du budget de l'Etat et des mesures fiscales qu'il contient. Elle présente les amendements retenus. Des rapports spéciaux décrivant les crédits affectés à chaque ministère devraient être préparés par les rapporteurs spéciaux et présentés lors du débat.

Dans le cadre du débat d'orientation budgétaire, le législateur devrait s'assurer par des auditions du contrôle de l'exécution des recettes et des dépenses. Le Gouvernement devrait accompagner ce débat d'un rapport présentant l'exécution du budget annuel et donnant les principales hypothèses macroéconomiques à partir desquelles il élabore le projet de loi de finances de l'année à venir. Une mise en perspective pluriannuelle du déficit budgétaire et de l'évolution de la charge de la dette devrait être présentée au législateur.

Lors de l'examen de la Loi de finances initiale, le Parlement devrait disposer de suffisamment de temps et avoir accès à l'ensemble des documents et à une information complète et exacte sur les données macroéconomiques et leur corrélation avec les prévisions budgétaires. A cet égard, si l'information soumise au Parlement doit être complète, il est souhaitable qu'une note résumée et claire, rédigée en langage accessible, lui permette d'avoir une idée synthétique des enjeux liés au budget dont il est saisi, y compris la stratégie de lutte contre la pauvreté et la dimension genre.

Une déclaration de politique générale est un bon document de synthèse de l'ensemble des politiques sectorielles du Gouvernement. C'est un instrument de travail de celui-ci pour les années à venir. Il permet aussi un contrôle plus aisé par le Parlement du respect des engagements du Gouvernement.

A l'occasion du débat budgétaire, le Parlement procède aussi à l'évaluation de l'efficacité des politiques publiques. Cette évaluation peut être réalisée par des études spécifiques effectuées par les commissions, par des études commandées à la Cour des comptes ou tout autre organisme. Ces études devraient être publiées.

Contrôle et suivi du budget

Pour le Parlement, le budget n'est pas une activité ponctuelle mais un processus qui s'étend sur l'ensemble de l'année. Il est donc souhaitable que le Parlement reçoive régulièrement communication sur l'exécution du budget et sur l'état des recettes et des dépenses par rapport au budget initial.

Par les questions parlementaires, les interpellations, les auditions, et les commissions d'enquête, il peut régulièrement demander au Gouvernement de s'expliquer sur l'exécution du budget. Il peut également demander aux organes de contrôle de l'Etat (par exemple la Cour des comptes) d'approfondir l'examen de questions précises : voir ci-après Cour des comptes.

En cas de changement de majorité en cours d'année budgétaire ou en cas de circonstances exceptionnelles d'importance majeure telle une récession économique brutale ou une catastrophe naturelle, le Parlement doit être associé à la correction du budget. Notamment, le Gouvernement devrait recueillir l'avis des commissions des finances sur les annulations et les ouvertures de crédits. Des lois de finances rectificatives doivent être soumises au Parlement pour régulariser les modifications apportées en cours d'exercice à la Loi de finances initiale.

Loi de Règlement

A la fin de l'année budgétaire, et dans un délai le plus bref possible, le Parlement doit pouvoir se prononcer sur la Loi de règlement sur la base d'un document transparent, lisible et sincère, qui porte sur le résultat et les comptes de l'année concernée. Ce document doit indiquer les écarts entre le budget voté et sa réalisation, et les causes de ces écarts.

Le vote de cette loi permet au Parlement de donner "quitus" à l'action du Gouvernement. Son examen devrait être le moment privilégié de l'évaluation des politiques publiques.

A cet égard, plus rapide est le dépôt de la Loi de règlement, mieux le Parlement et le Gouvernement peuvent orienter les budgets ultérieurs en fonction des enseignements que comporte l'exécution des budgets concernés. Il convient donc de veiller à ce que la Cour des comptes dispose des moyens humains et matériels lui permettant de disposer d'un rapport sur la Loi de règlement dans les délais les plus brefs possibles.

Cet examen dans un délai raisonnable est aussi un gage de sanction rapide à l'égard des manquements, y compris ceux liés à la corruption.

Moyens de contrôle

Moyens internes de contrôle parlementaire :

  • Les Commissions : Les membres des Commissions techniques constituées par l'Assemblée nationale peuvent interpeller le Gouvernement pour des affaires de toute nature. ·
  • Questions orales ou écrites : Les parlementaires peuvent adresser au Chef du Gouvernement et aux Ministres des questions orales ou écrites relatives aux affaires de leur ressort.
  • Les Commissions d'enquête : elles ont pour mission:
    i) de recueillir des éléments d'information sur des faits déterminés et de soumettre leurs conclusions à l'Assemblée qui les a crées;
    ii) d'examiner la gestion administrative, financière ou technique des services publics, en vue d'informer l'Assemblée nationale du résultat de leur examen.
Autres moyens de contrôle :
  • La Cour des comptes : voir ci-après;
  • La communication au Parlement des audits, rapports d'analyse et d'évaluation des organismes nationaux (Banque nationale, audits commandés à des experts privés) et internationaux (FMI, Banque mondiale, BAD, UEMOA);
  • La communication et l'examen des pétitions des citoyens, rapports des médiateurs et avis de la société civile sur l'exécution du budget.
La Cour des comptes

Qu'elle soit rattachée au Pouvoir exécutif, législatif ou judiciaire, l'essentiel est qu'elle dispose d'une large indépendance et d'une réelle autonomie ainsi que de moyens suffisants pour accomplir ses missions.

Elle doit exercer un triple contrôle :

  • Contrôle financier : La Cour doit vérifier l'exactitude, la fiabilité et l'exhaustivité des états financiers de tous les pouvoirs publics, en s'assurant de la conformité des opérations comptables à la réglementation sur la comptabilité publique. Dans le cadre de ce contrôle, la Cour devrait exercer une mission juridictionnelle à l'égard des comptables publics et des ordonnateurs, qui tous devraient être tenus responsables sur leurs propres deniers, sauf décharge au cas où leur responsabilité ne serait pas retenue. En cas de malversation ou de corruption constatée, la Cour devrait dénoncer les faits au Pouvoir judiciaire.

  • Contrôle de légalité : La Cour devrait vérifier la conformité des dépenses et des recettes publiques par rapport à la Loi budgétaire et, sauf pour les dépenses de personnel et un certain nombre de dépenses répétitives, exercer un certain contrôle de légalité par le biais du visa préalable des ordonnances de dépenses.

  • Contrôle du bon emploi des deniers publics : Une Cour moderne, au service de la bonne gouvernance, se doit de procéder au contrôle du bon emploi des deniers publics par référence à trois concepts :
    (i) L'économie qui vérifie si les ressources utilisées l'ont été au meilleur coût, tant d'un point de vue qualitatif que quantitatif;
    (ii) L'efficacité qui donne la mesure dans laquelle les objectifs et les finalités assignées sont atteintes;
    (iii) L'efficience qui mesure si les moyens mis en œuvre ont été utilisés de manière optimale pour atteindre le résultat obtenu.
Ce contrôle à posteriori se fait sur l'initiative de la Cour elle-même ou à la demande du Parlement.

Les moyens nécessaires au Parlement pour l'exercice de sa fonction de législateur

Le Parlement, qui autorise la perception des impôts et vote les dépenses, doit disposer de moyens humains et matériels permettant un véritable contrôle de l'action gouvernementale.

Le parlement doit pouvoir disposer des moyens financiers nécessaires à l'exercice de ses missions.

L'autonomie financière des assemblées doit être affirmée en théorie et en pratique. Conformément au principe fondamental de séparation des pouvoirs, le budget interne du parlement doit être établi sous la seule responsabilité de l'assemblée et transmis au gouvernement pour être intégré dans le budget de l'Etat. L'Exécutif ne doit pas être juge de l'opportunité des moyens dont le parlement a besoin pour l'exercice de sa mission. La dotation de l'assemblée doit être intégralement versée par l'Etat dès le début de l'exercice budgétaire. Le contrôle de l'exécution du budget du parlement doit être confié à une commission composée de parlementaires dans laquelle l'opposition est pleinement représentée.

Cette autonomie financière doit, notamment, permettre de mettre à la disposition du parlement et des parlementaires des collaborateurs en nombre suffisant. La technicité de l'analyse des lois de finances et la complexité des documents économiques et financiers imposent en effet le développement d'une capacité d'expertise. Deux solutions sont envisageables:

  • Recours à des experts de haut niveau (universitaires, juristes, économistes etc.);
  • Développement d'une fonction publique parlementaire apolitique.
Pour ce qui est de la fonction publique, elle devrait être régie par un statut garantissant la stabilité de fonction. Ce statut peut résulter selon les cas de la loi ou d'un règlement propre à l'Assemblée. Les fonctionnaires qui sont au service exclusif du parlement doivent faire preuve d'une totale objectivité et disponibilité dans l'exercice de leur fonction. Ils sont tenus à un devoir de réserve et de discrétion professionnelle accrues.

Le recrutement de ces fonctionnaires peut provenir de la mise à disposition de fonctionnaires de l'Exécutif ayant vocation à intégrer le Parlement, ou de personnes recrutées par concours.

A côté de ces collaborateurs publics il serait souhaitable que les parlementaires puissent recevoir l'aide d'assistants. Les groupes politiques pourraient également s'entourer d'une équipe d'experts au bénéfice de leurs membres.

Pour ces différentes catégories de collaborateurs une formation permanente est indispensable. Elle devrait porter en priorité sur la maîtrise du processus budgétaire. Un segment particulier de cette formation pourrait être dédié à l'analyse des données sous l'angle de l'équité entre les sexes. Il serait au reste souhaitable que les parlementaires puissent également bénéficier d'une formation économique et financière suffisante pour appréhender le processus budgétaire, y compris sous l'angle du genre..

L'accès aux informations économiques, financières et budgétaires devrait être développé sous ses formes classiques comme sous ses formes électroniques (base de données, Internet). L'accent pourrait être mis en particulier sur les informations prenant en compte la disparité entre les sexes et permettant l'élaboration de politiques plus équitables. Les moyens nécessaires à l'exploitation et au traitement de ces informations devraient être développés notamment au sein des commissions des finances mais aussi en améliorant les services de documentation et de recherche du Parlement. Une formation spécifique aux techniques de recherche documentaire devrait être fournie aux parlementaires et à leurs collaborateurs.

Le parlement devrait également être assisté, notamment dans sa fonction de contrôle, par une Cour des comptes dont l'indépendance est garantie.

La Cour des comptes devrait notamment pouvoir procéder à des audits financiers à la demande du parlement. Il importe que ces audits soient réalisés dans un laps de temps compatible avec le besoin politique de contrôle. Un délai de six à huit mois pourrait être envisagé. La Cour pourrait également réaliser un rapport sur l'exécution du budget qui viendrait en appui du débat d'orientation budgétaire. De même, la Cour des comptes devrait systématiquement adresser son rapport sur la Loi de règlement du budget de l'année n-1 lors de la discussion du budget de l'année n+1.

L'apport de la Cour des comptes et éventuellement d'autres organismes de contrôle de l'Etat ne doit pas s'opposer à la création d'un office d'évaluation des politiques publiques au sein du Parlement notamment dans une perspective d'équité entre hommes et femmes. Cet office devrait pouvoir vérifier l'efficacité de la dépense publique par rapport à ses objectifs initiaux.

Le Parlement devrait se doter des moyens nécessaires à sa communication budgétaire et institutionnelle. Il est notamment important que les compte-rendus des travaux des commissions ainsi que des débats en séances plénières puissent être largement diffusés y compris par l'utilisation des nouvelles technologies de l'information.

Des présentations simples du contenu des Lois de Finances pourraient être réalisées à destination des citoyennes et des citoyens. Un bulletin d'information sur les activités du parlement pourrait être également diffusé.

Une attention particulière devrait être portée aux relations avec la presse et les médias en facilitant leur accès aux travaux parlementaires sur le budget.

Approche genre du budget

En tant que concept, le genre fait référence à des caractéristiques socio-culturelles acquises et donc variables et dynamiques en fonction de la religion, de l'éducation, des valeurs socioculturelles, ou du contexte économique, qui déterminent le rôle et la place des hommes et des femmes dans la société. Le concept genre se fonde sur le fait que les différences, les rôles, les positions entre les hommes et les femmes découlent d'une construction sociale et culturelle basée sur une inégalité fondamentale. Par conséquent, une approche de sociabilisation basée sur l'équilibre des relations entre les hommes et les femmes devrait aboutir à la construction d'une société plus juste et plus équitable. L'analyse sociale selon le genre devrait faciliter pour chacun, hommes et femmes, et à tous les niveaux, l'accès aux moyens et aux bénéfices du développement.

L'approche genre repose sur les principes d'équité, d'égalité et de justice. Contrairement à l'approche IFD (intégration de la femme dans le développement) qui consistait à faciliter l'intégration des femmes dans les projets pour que leur performance soit rentable dans les domaines qui leur sont traditionnellement assignés, l'approche genre vise l'inégalité entre les hommes et les femmes, les filles et les garçons, dans un objectif de rééquilibrage des rôles et dispositions. Il s'agit, par exemple, de promouvoir le changement des lois discriminatoires envers les femmes ou de favoriser leur accès à la terre ou bien encore de soutenir leur accès à des positions de décision et de faire des femmes les bénéficiaires et les actrices du développement. L'approche genre prend donc en compte les besoins pratiques (alimentation, santé, allègement des tâches domestiques, etc.) et les intérêts stratégiques des femmes (renforcement des capacités, égalité, accès au pouvoir décisionnel).

La prise en compte du genre dans le processus budgétaire pose la problématique d'une nouvelle approche de la planification du développement, du contrôle parlementaire et de la participation de la société civile au dialogue sur les politiques.

Cette nouvelle approche doit s'accompagner d'un dispositif ou cadre de suivi des indicateurs de résultats axés sur le genre, déclinés au niveau stratégique (cachage macroéconomique et budgétaire), au niveau opérationnel (politiques sectorielles).

La déclaration de politique générale du Gouvernement et la séance d'orientation budgétaire constituent pour les parlementaires des opportunités pour demander au Gouvernement, si ce n'est déjà fait, de prendre en compte la dimension genre dans les projets de budget à soumettre à l'institution parlementaire.

La création de bases de données désagrégées par sexe et d'observatoires sur le suivi des conditions de vie des hommes et des femmes, des jeunes et des personnes âgées, constituent des instruments efficaces pour vérifier périodiquement l'impact des investissements faits en faveur du genre.

Les débats sur l'approche genre dans le processus budgétaire ont fait ressortir des positions figées au départ sur l'efficacité de ce nouveau concept pour certains, concept qui gagnerait à être vulgarisé largement et à tous les niveaux pour permettre à ceux qui auront à l'utiliser comme outil de travail d'en cerner tous les contours.

Néanmoins, beaucoup de participants ont salué l'opportunité de l'introduction du thème et de son utilisation à bon escient pour lutter contre la pauvreté et toutes les autres discriminations dont les femmes sont l'objet.

A ce titre, le séminaire a retenu l'éducation, le renforcement des capacités, l'alphabétisation fonctionnelle, la participation au dialogue politique, l'accès à la terre, aux ressources et à la prise de décision comme thèmes émergents à développer en faveur des femmes pour lui permettre en toutes connaissances de cause d'apporter un plus au développement.

Certes, il faut reconnaître que des contraintes inhérentes à la nature des règles quasi-immuables de procédures d'élaboration, d'exécution et de vote du budget entravent la capacité des parlementaires d'exercer un contrôle régulier et efficace de la prise en compte genre. C'est pourquoi le renforcement des capacités techniques des planificateurs, des parlementaires et du personnel d'appui en matière d'identification, d'analyse des disparités de genre et de suivi des indicateurs différenciés par sexe demeure indispensable pour assurer l'impact des investissements.

L'exercice n'est pas facile et il ne le sera pas à court terme, car au-delà de notre commune volonté, il s'agira de rompre avec des habitudes souvent figées qui sont le fruit d'une construction sociale et non biologique, avec des convictions fortes et intimes, bâties sur des échelles de valeur qui inhibent le potentiel d'initiatives et de capacités porteuses de progrès dans la dignité, l'égalité, la justice.

Il n'existe pas de recettes simples et universelles pour le lancement de ce type d'initiatives mais on peut tirer les leçons de l'expérience de chaque pays (en Afrique, notamment l'Afrique du Sud et l'Ouganda et, dans une moindre mesure le Burkina Faso) en comparant les forces et les faiblesses, les ressemblances et les différences. Dans cette mouvance, développer le partenariat entre Gouvernement, Parlement et ONGs sensibles au genre peut se révéler être une bonne pratique.

Suivi du Séminaire

L'Union interparlementaire et ses partenaires devraient continuer d'organiser, à l'intention des parlementaires et du personnel parlementaire, des séminaires de ce type, aux niveaux national et régional, en Afrique comme dans d'autres régions du monde.

Il serait opportun que, comme elle a entrepris de le faire, elle mette dès que possible à la disposition des parlementaires des guides à leur intention sur le thème du Séminaire.

Quant aux participants, il est décisif qu'ils partagent les acquis du Séminaire avec l'ensemble de leurs collègues au sein de leur Parlement national. A cet effet, les Parlements concernés de l'Afrique sont invités à faire le plus large usage du présent rapport, notamment en le mettant en priorité à la disposition de la Commission des finances mais aussi à celui des autres commissions, et le cas échéant en le mettant en délibération.

Il serait en outre recommandable et profitable que les Parlements concernés procèdent à un débat sur le genre, éventuellement avec l'aide d'experts. Il pourraient aussi utilement mettre en place des groupes de réflexion parlementaire à composition mixte pour les aider à veiller à ce que l'ensemble de leurs travaux, et singulièrement le Loi des finances, tienne compte de la dimension genre.


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